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AVERROES, le Commentator (né à Cordoue en 1126, mort à Marrakech, en 1198) Article Wikipédia ici
Synopsis : pb: l'intellect agent et patient sont ils "deux états de la même substance, sous sa forme passive puis active dans le corps" <A. L. Ivry "La logique de la science de l'âme. Etude sur la méthode dans le Commentaire d'Averroès in "Penser avec Aristote" p.693> ou si la spécificité du GC n'est pas d'affirmer que l'intellect matériel est lui-même une substance distincte de l'intellect agent, et comme lui éternelle et unique, celle du CM <commentaire moyen> étant de ne reconnaître qu'un seul intellect, l'intellect agent, qui, "joint à l'homme, est intellect disposé et en puissance et qui, libre de cette jonction, est l'intellect toujours en acte." <A. Elamrani-Jamal> Mais la situation du GC est plus complexe, il est dur de trancher entre ces deux alternatives. cf le commentaire 20 : dans l'union ou jonction finale de l'homme avec l'intellect, l'intellect matériel et agent "apparaîtront comme étant deux d'une certaine façon et comme ne faisant qu'un, d'une autre." pb: quel texte du De Anima a-t-il commenté? Au moins 2 textes arabes. Un "etiam" de trop et l'intellect matériel devient "aussi" "impassible et sans mélange". Certaines des thèses d'Averroès dépendent directement de l'état du texte qu'il commente. D'abord se demander comment se produit l'acte de concevoir? Concevoir par l'intellect = action ou réception? A de nombreux endroits l'analogie du moteur et du mû sert de modèle épistémologique. |
Né en 1126 "C’est surtout comme commentateur d’Aristote qu’Averroès fut connu des Latins : il est pour eux « le Commentateur », comme Aristote est « le Philosophe ». C’est ainsi que Dante le présente, dans les Limbes, au milieu d’autres philosophes et savants : « Averroès, qui fit le grand commentaire » (Inferno , IV, 144)." "ce passage du grand commentaire du traité De l’âme (III, 14) : « Ce point est si difficile que, si Aristote n’en avait pas parlé, il eût été très difficile, impossible peut-être, de le découvrir – à moins qu’il ne se fût trouvé un autre homme comme Aristote. Car je crois que cet homme a été une norme dans la nature, un modèle que la nature a inventé pour faire voir jusqu’où peut aller la perfection humaine en ces matières. »"(Universalis, art. Averroès) |
"Dans ses Collationes de decem praeceptis , Bonaventure (Jean de Fidanza), ministre général de l’ordre des Mineurs, met en place une critique systématique des « trois erreurs à redouter dans la pratique des sciences », qui servira elle-même de matrice à toutes les condamnations ultérieures de la philosophie péripatéticienne. La première concerne « la cause de l’être » (causa essendi ), c’est l’affirmation de l’éternité du monde ; la deuxième, « la raison de l’intelligence » (ratio intelligendi ), c’est la confession du déterminisme ; la troisième, « la règle de la vie » (ordo vivendi ), et c’est la position de l’unicité de l’intellect ou monopsychisme. Ce premier quadrillage des erreurs philosophiques sera plus ou moins clairement repris et développé par l’évêque de Paris Étienne Tempier, dans ses condamnations de 1270 et 1277. " (Universalis, Art. Aristotélisme médiéval) |
Conversion : "…les formes des choses extérieures meuvent cette faculté [l'âme rationnelle] dans la [stricte] mesure où l'esprit (mens) les retire [préalablement] de [toute] matière et les rend pour la première fois intelligibles en acte, alors qu'elles étaient auparavant intelligibles en puissance, il appert que, sous ce rapport (ex hoc modo), l'âme [rationnelle] est active et non pas [seulement] passive : en tant que les intelligibles la meuvent, elle est passive, en tant qu'ils sont mues par elle, elle est active." (4) "…les intelligibles (intellecta) sont des "intentions" abstraites de la matière des formes de l'imagination." (30) |
Dépouiller (denudare) : "les "intentions" imaginées ne meuvent l'intellect matériel que quand elles deviennent intelligibles en acte après l'avoir été en puissance." (5) "En effet, abstraire n'est rien d'autre que rendre les "intentions" de l'imagination intelligibles en acte après l'avoir été en puissance et concevoir n'est rien d'autre que recevoir ces "intentions"." (…) "tous les dits d'Aristote sur ce sujet [tendent à prouver] que les universaux n'ont pas d'être en dehors de l'âme, contrairement à ce que soutenait Platon. Car si tel était le cas, il n'y aurait pas besoin de poser un intellect agent." (18) |
Double vérité : vraie suivant la philosophie, fausse suivant la foi. La double vérité a surtout été reprochée par les condamnations de 1277. Mais la présence de ladite thèse chez Averroès n'a jamais été établie. |
Formare per intellectum: renvoie ultimement au grec noein. "…par concevoir par l'intellect il entend la réception qui est toujours dans l'intellect matériel" (5) |
Formes sensibles : "…il en est ainsi des formes sensibles, à savoir qu'elles sont du particulier dans du particulier." (9) |
Homo intellegit : proposition avançant que l'homme pense ce qui implique une pensée personnelle.L'Anonyme d'Oxford réfute cette proposition : l'intellect se sert de l'homme pour penser. Etienne Tempier a condamné 2 fois cette thèse (1270-1277) S'il y avait une seule âme elle serait à la fois sage, folle etc. mais l'argument thomiste, facile ne convient pas à Averroès, plus fin. |
Imagination : "l'âme rationnelle a besoin de considérer les "intentions" existant dans la faculté imaginative, tout comme les sens ont besoin d'inspecter les sensibles." (4) "Mais on ne peut pas non plus dire que les "intentions" de l'imagination sont seules à mouvoir l'intellect matériel et à l'extraire de la puissance à l'acte, car, s'il en était ainsi, il n'y aurait aucune différence entre l'universel et l'individu, et l'intellect appartiendrait au [même] genre [que] la faculté imaginative. Bien que l'on pose que le rapport des "intentions" de l'imagination à l'intellect matériel est comme le rapport des sensibles au sens (comme Aristote le dit ensuite), il est donc nécessaire de poser qu'il y a un autre moteur qui les rend à même de faire passer à l'acte l'intellect matériel (ce qui consiste à les rendre intelligibles en actes en les abstrayant de la matière)." (18) |
Incorruptibilité de l'intellect : "Il <Aristote> dit ouvertement qu'aucune des deux parties de cette âme <rationnelle> n'est engendrable ni corruptible." (commentaire 4) |
Intellect : "Averroès explique que, si nous connaissons intellectuellement, c’est parce que les formes recueillies dans l’imagination, et potentiellement intelligibles, le deviennent actuellement sous l’action de l’intellect « agent » ; alors elles « meuvent » à leur tour l’intellect « matériel » (ainsi nommé parce qu’il joue ici un rôle analogue à celui de la matière ; l’expression remonte à Alexandre d’Aphrodise, commentateur grec des IIe-IIIe siècles après J.-C.). Ces deux intellects sont l’un et l’autre éternels, et uniques pour tous les hommes. " " l’homme, en tant qu’être spécifique, est toujours nécessairement « joint » aux intellects. Bien entendu il en va autrement pour les hommes particuliers : la pensée de chacun est liée à ses propres images. C’est pourquoi, malgré l’unicité des intellects, les pensées de chaque homme sont différentes de celles des autres ; cela explique aussi que ma pensée soit, en un sens, mienne, puisqu’il dépend de moi de me joindre à l’intellect agent, c’est-à-dire de faire que l’intelligible soit abstrait de mes images. Mais, Aristote l’enseigne, l’imagination est liée au corps, et meurt avec lui : c’est pourquoi la pensée individuelle est périssable, et, après la mort, « nous ne nous souvenons plus » " "le grand commentaire sur la Métaphysique explique que les substances séparées – et l’intellect agent en est une – peuvent être connues intellectuellement par nous, bien que ce soit difficile. La « jonction » nous unit donc à l’intelligible pur : c’est alors « la béatitude », « le grand but, l’immense bonheur » ; l’homme en cette situation fait le lien entre l’actualité de l’intelligible et le sensible, puisque c’est en pensant ce dernier qu’il s’est élevé « de perfection en perfection, de forme en forme ». Averroès va jusqu’à dire que, selon Thémistius (IVe s.), il est alors « assimilé à Dieu en ce qu’il est et connaît tous les êtres : car les êtres, et leurs causes, ne sont que la science de Dieu ». Non que pour Averroès l’intellect agent soit Dieu, mais la jonction à cet intellect élève l’homme au niveau des substances séparées et de l’intelligible pur. " (Universalis, art. Averroès) Intellect agent, matériel (possible) et intellect passible (imagination). / "…il s'assimile à eux <aux sens> sous le seul angle de la réceptivité, car il n'est pas une faculté [existant] dans le corps." (commentaire 2) L'intellect est au sens "comme cela, sans être cela." (3) "…il y a dans l'âme trois parties d'intellect : l'une est intellect récepteur, la deuxième est efficiente, la troisième est produite. De ces trois, deux sont éternelles, à savoir l'agente et la réceptrice. Quant à la troisième, elle est d'une certaine façon engendrable et corruptible, et d'une autre, elle est éternelle." (5) "il est intelligible par [la présence d'] une forme en lui, comme les autres choses intelligibles." (16) |
Intellect agent : "Quant au fait que tantôt l'intellect agent conçoit quant il se joint à nous et que tantôt il ne conçoit pas, cela viendrait de son mélange, c'est-à-dire de son mélange avec l'intellect matériel." (5) "puisque les intelligibles théoriques nous sont unis par les formes imaginaires, et que l'intellect agent est lui-même uni aux intelligibles théoriques (du fait que ce qui les perçoit est le même [sujet], à savoir l'intellect matériel), il est donc nécessaire que l'intellect agent nous soit uni par sa jonction avec les intelligibles théoriques. Et il est manifeste que, quand tous les intelligibles théoriques existent en nous en puissance, il nous est uni en puissance, que quand tous les intelligibles théoriques existent en nous en acte, il nous est uni en acte" (36) |
Intellect matériel : c'est la perfection première de l'homme qui n'est pas nombrée selon les individus. Le pb sera de passer de cette perfection une pour tous à la perfection dernière nombrée par les individus. Il n'est lui-même pas mélangé au corps. Il est un "quatrième genre d'être" c-à-d ni forme, ni matière, ni composé forme-matière.(5) dans le 6, il montre que "…l'intellect matériel n'est pas mélangé à la matière." (7) "…l'intellect matériel récepteur doit appartenir au genre des puissances passives et que, malgré cela, il ne subit pas de changement lors de la réception [d'un intelligible], car ce n'est ni un corps, ni une faculté existant dans le corps" (…) "Si, en effet, il était mélangé, alors [l'intellect] serait soit un corps soit une faculté [existant] dans le corps et, dans les deux cas, il aurait une forme propre, cette forme l'empêcherait de recevoir toute forme externe différente, parce qu'elle serait autre que la sienne." (…) "…la substance que l'on nomme "intellect matériel" n'a dans sa nature aucune d'entre les formes matérielles." "Il [l'intellect matériel] est donc absolument sans mélange avec la matière." "[L'intellect matériel] est donc un étant autre que la forme, que la matière et que l'agrégat des deux." (4) "…l'intellect matériel n'a pas de forme matérielle" l'intellect matériel est inengendrable en tant qu'il n'est pas un "ceci" et que tous les ceci sont engendrés. (5) [L'âme est le sujet, elle seule est la tablette non écrite prête à recevoir l'écriture, l'intellect n'est pas le sujet, il n'est que le non-écrit de la tablette. L'intellect est donc une sorte d'aptitude à accueillir les formes, et il ressemble à une tablette non écrite ou plus exactement, au "non-être-écrit" de la tablette, et non à la tablette elle-même] (note 128) "…l'intellect matériel est unique pour tous les hommes, et que, par là, nous avons aussi été conduit à penser que l'espèce humaine est éternelle" (5) pb: si l'intellect n'est pas matériel, comment pâtit-il? dilemme "soit attribuer la passivité à l'intellect (ce qu'Averroès rejette), soit assimiler purement et simplement l'intellect à l'imagination –ce qui est également impossible; La solution du C14 consistera à poser que l'intellect relève de la passio simpliciter, qui n'implique qu'une réceptivité sans changement, au contraire de ce qu'il en est dans les choses matérielles." (note 341) "comment concevoir que l'intellect matériel est quelque chose de simple, sans mélange avec quoi que ce soit, si l'on soutient que concevoir est une passion et si, comme il est indiqué dans les livres généraux, l'agent et le patient communiquent nécessairement dans le sujet?" (14) "…la passivité qui est dans l'intellect – à savoir qu'il s'agit d'une pure réception, sans changement, comparable à la réception d'une image sur une tablette. De même, en effet, qu'une tablette ne pâtit pas du fait de l'image et qu'elle ne subit aucun changement à cause d'elle, mais ne présente le caractère (intentio) de la passion qu'au sens où elle est parfaite par l'image, après avoir été peinte en puissance, de même en va-t-il pour l'intellect matériel." (14) "…l'intellect matériel ne conçoit pas de sensible indépendamment de l'imagination." (30) |
Intellect théorétique (intellectus speculativus): c'est la perfection dernière de l'homme qui est nombrée selon les individus "…l'intellect dit "théorétique", celui que l'intellect agent pose dans l'intellect matériel récepteur (…) si le récepteur est éternel et si l'agent est éternel, [ce qui est] produit [à partir d'eux] doit nécessairement lui-même être éternel." "quand l'agent est éternel et le patient éternel, nécessairement le produit est éternel." (5) |
Intentio : traduit l'arabe ma`nã (terme très large) |
Intentions imaginées : "la jonction des intelligibles avec nous autres hommes se fait par la jonction des "intentions" intelligibles avec nous, [plus précisément] de cette partie des ["intentions" intelligibles] qui est en nous d'une certaine manière comme [leur] forme – et ce sont les "intentions" imaginées." (5) "…l'intellect qui est en nous ne voit quelque chose et ne le pense que s'il le pense joint à une image. En effet, les images sont les sensibles de l'intellect, et elles lui tiennent lieu des sensibles, en l'absence des sensibles ; mais ce sont des sensibles non matériels." (39 <dernier commentaire>) |
Rapport religion / philosophie : "Il n’y a pas de contradiction entre la philosophie et la loi divine : celle-ci, au contraire, appelle à étudier rationnellement les choses ; d’autre part, « le vrai ne peut contredire le vrai ». On peut donc se proposer légitimement d’« unir le rationnel (ma‘qul ) et le traditionnel (manqul ) ». Ce programme est possible, parce que la loi divine a un sens extérieur (zahir ) et un sens intérieur (batin ) : les hommes capables de science doivent pénétrer jusqu’à celui-ci et le garder pour eux, les autres se contentant du premier, qui précisément leur est destiné. "(Universalis, art. Averroès) |
Sujet de la pensée : à la question du sujet, Averroès avance sa théorie des "deux sujets". "…l'interprétation d'Averroès, qui fait de l'intellect possible une substance unique et séparée jointe occasionnellement aux âmes humaines, comme un moteur à un mobile." (intro de De Libera, p.41) [Tout l'effort d'Averroès va être (…) de montrer qu'il faut deux sujets distincts pour expliquer la formation de l'intelligible en acte : l'entité imaginative, qui joue le rôle de moteur, et l'intellect matériel récepteur, qui est mû par elle, le résultat "commun" aux deux étant l'intelligible en acte, qui, toutefois n'a pour sujet que le seul intellect matériel dont il est la perfection dernière. C'est donc dans l'intellect matériel que s'effectue pour Averroès le véritable passage de la puissance à l'acte, c'est à dire de la perfection première à la perfection dernière.] (note 164) |
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